Milky Ways
Au fur et àmesure que la technologie se perfectionne, tendant vers un idéal que l’on peine encore àdéfinir, l’appropriation artistique des outils emprunte des voies détournées, qui, loin d’échapper aux dernières sirènes n’en pose pas moins des questions troublantes.
La fin des années 80 et le début des années 90 annonçaient l’avènement, en télévision, de l’image haute définition. La chose se réalise actuellement sans qu’on y voie une rupture majeure. En revanche la vidéo sur le téléphone mobile crée un engouement inattendu, comme le texte (SMS) l’avait fait àson apparition, contre toute attente. Plus le film et le cinéma tendent vers une finesse de détail, une surenchère supposée qualitative de définition, de nuances et de contraste, plus on est frappé par le succès de films tournés avec des cameras d’amateur par des équipes non professionnelles. C’est probablement que dans l’image l’émotion provient plus de l’usage qui en est fait que des performances de l’équipement; de la situation que de la mise en scène (vidéo prise àla volée sur son téléphone portable); de l’espace de projection laissé àl’imaginaire du spectateur plus que de la sur-définition d’un propos qui en est réduit aux limites de celui qui le tient.
L’image la plus actuelle surfe avec l’imaginaire de celui qui la regarde. Elle augmente son taux de virtualité, l’étirant parfois jusqu’àla limite de lisibilité. Le sous-cadré, sous-défini, sous-exposé… surinvesti par le regardeur.
Le projet : jouer avec cette limite de l’en deçàdu perceptible, filmer avec un téléphone portable la voute étoilée, par un ciel clair de printemps. Les étoiles, plus petites que les pixels, la myopie affirmée de la technologie. Le son est du même calibre : je raconte àmon amie, en Australie, le ciel que je lui montre tâchant de percevoir en quoi il m’aurait déterminé. Elle me présente le sien, inversé, tout aussi peu visible àmes yeux s’efforçant d’en déduire sa propre histoire.