Projet de carrière d’artiste
Je propose à un artiste de s’approprier l’oeuvre de grands écrivains en changeant uniquement le nom des principaux personnages et lieux où l’action se déroule avant de proposer le texte à différentes maisons d’édition. L’idée est de montrer la barbarie du système de sélection à l’oeuvre dans les maisons d’édition et leur faculté quoique qu’elles en disent à passer à côté de chef d’oeuvre.
Lettres laissées pour mortes et renvois seraient chargés de rendre compte de la pratique artistique de l’auteur.
Installation, vent
Dans une période où la sensation redevient une valeur acceptée par le monde de l’art, James Turrell, Anish Kapoor, Olafur Eliasson, on peut, dans le même esprit, penser que les artistes du vent (Fan Addicts, cf. plus bas) pourraient travailler l’intensité par le vide. De Klein à Turrell, on a cherché à créer une véritable aspiration de l’âme par forfait de la rétine (on ne parlera jamais assez du retour du rétinien dans la période contemporaine). Assumons la littéralité du propos, et après l’immersif promulguons l’aspiration, supposée pleine de nos espoirs et de nos doutes.
La surface affectée est au travail de Turrell ce que la fenêtre est au tableau de la Renaissance.
Il s’agit d’un trou, donnant sur un espace noir, sans reflet, absorbant la totalité de la lumière. Quand on passe devant on est comme physiquement happé par le vide d’air entretenu à l’intérieur. Le dispositif oblige à se tenir à distance, et là , seul un rectangle noir semble collé à la surface du mur. La minceur de ce dernier pourrait donner l’impression de l’épaisseur d’une toile tendue sur un châssis à la perspective inversée.

Mais là , pour le marchand, c’est dur de vendre du vent, et plus encore quand l’œuvre prend, en lumière et en air, plus qu’elle ne donne
Et pour le Fan Addict, il se pourrait que ce soit la présence visuelle de l’hélice qui crée le manque. Si création il y a.
Projet de carrière d’artiste
Player : we-make-money-not-art.com, Manuel Braun

Il est symptomatique de voir comment certains objets prennent une place symbolique renouvelée dans le champ de la création interactive. Le ventilateur constitue un de ces objets qui font maintenant partie de la panoplie de l’artiste « émergent ». Et ceci n’est probablement pas sans raison. On n’en finit plus de dire que notre interaction avec le monde est multi-sensorielle, kinésthésique, que l’art devrait s’exercer sur des sens jusqu’alors trop ignorés de la rhétorique plastique.
Contrairement au générateur de parfum et aux sources de chaleur, le ventilateur est très réactif. Il touche l’ensemble du corps. Il représente définitivement l’immatériel réifié. C’est clairement, de l’ensemble des media, le seul qui décoiffe vraiment.
Il est intéressant de constater qu’une des Å“uvres emblématiques des débuts artistiques de l’interactivité soit « La Plume » d’Edmond Couchot et Michel Bret. La c’est le public qui souffle et l’image qui bouge. C’est un juste retour des choses que dans une pièce comme Blow Up de Scott Snibbe (2005), le public soit enfin physiquement touché par l’œuvre, avant que le phénomène ne s’étende, multipliant transitions et passerelles entre espace physique et espace physique (après espace physique et représentation). Vers une esthétique du vent ?
En architecture, les murs ont été progressivement remplacés par le verre, par l’image, et bientôt par le vent (déjà les murs d’air des salles d’opération des hôpitaux modernes…).
Bref j’imagine avec intérêt que nous voyons venir des artistes qui décident une fois pour toute que leur œuvre ne sentira pas la térébenthine, ne produira pas d’image, et ne cherchera pas à juxtaposer parapluies et machines à coudre mais produira du vent, savamment maîtrisé ou habilement libéré, sans que cet oeuvre soit le moins du monde considéré comme inconsistant.
Vidéo, 24h
L’image-mouvement pourrait ne laisser apercevoir ses mutations que lorsque le spectateur dilettante la quitterait des yeux.
On l’a assez répété, l’image animée doit parfois jouer de mutations rapides pour, grâce à la persistance des impressions rétiniennes, donner l’impression de continuité de mouvement dans une succession d’images fixes.
Paradoxalement, une variation très lente dans l’image, même lorsqu’elle affecte une partie importante de celle-ci, reste totalement imperceptible pour le spectateur attentif. La moitié bleue de l’image peut devenir rouge, si cette mutation dure trois minutes, il est probable qu’elle passe totalement inaperçue.
Le spectateur inattentif, lui, la voit ! Il regarde l’écran puis passe à autre chose, quand il revient, la rupture est suffisamment importante pour devenir remarquable.
La perception du mouvement résulte alors de l’inattention.
L’esthétique cinématographique marquée par les notions de séduction/fascination/récompense que l’on retrouve dans le caractère supposé déceptif de l’art contemporain, est alors contredite ici, seul l’indifférent est récompensé car il est le seul dont la perception ne sera ni anesthésiée ni abusée par la continuité. L’esprit en éveil récrée l’intermittence et la séquentialité qui fait défaut à la surenchère chronique. Pour que la révélation ait lieu, le spectateur doit à son tour devenir l’intermittent du spectacle.
projet de carrière d’artiste
player : Edouardo Kac
Edouardo me fait remarquer que le projet La Ligne (cf. plus bas) a déjà été réalisé par Santiago Sierra qui a payé 30 US$ des cubains dans le besoin pour leur tatouer sur le corps une ligne de 2,40m.
Même si les projets diffèrent par la surface d’application (des collectionneurs dans le cas de mon projet) je dois admettre que j’ai probablement entendu parler de ce projet. Et voilà que je le croyais tout neuf!
Me vient alors l’idée qu’un artiste pourrait choisir de ne plus consacrer son travail à la documentation, représentation, illustration, interprétation, dénonciation, révélation de ce qui l’entoure mais plutôt à choisir et à refaire ce qui a déjà été fait par d’autres. La musique nous a familiarisés avec la notion d’interprétation et on ne reproche jamais au chef d’orchestre ou au musicien de ne pas avoir écrit la partition qu’ils interprètent.
Rien n’exclu que l’interprétation d’une Å“uvre antérieure soit meilleure, comme en musique, que l’interprétation de son auteur original.
La version originale de La Ligne en ligne :
http://www.santiago-sierra.com/996_1024.htm
Projet de carrière d’artiste
Au delà du Ready Made Artist qui en a fini de traverser le XXième siècle, le No Comment Artist pourrait être celui qui présente les faits, assumant la désignation, non comme gesticulation dénonciatrice (montrer du doigt) mais comme geste ultime, désespéré, pour ne pas dire ce qui est criant.
Le NoCArtiste se satisfait d’extraire du monde ce qui merite d’être rendu visible, sans adjuvant, sans excipient esthétique, et sans garantie que la médecine fasse son effet.
En celà , le No Comment Artist se rapproche du Placebo Artist, qui de l’Hactiviste au militant de la sociologie esthétique traite naturellement les maux qui disparaissent d’eux-mêmes et n’a que peu d’effet sur les maux durables.




Franc-prix est une machine qui propose aux artistes la traduction de leurs factures de biens de consommation alimentaire en œuvre d’art. Après l’insertion de la facture dans la machine et le traitement en temps réel des informations collectées s’imprime un tableau dont la taille, les formes et les couleurs sont paramétrées de la manière qui suit :
- Le code couleur correspond aux six derniers chiffres du code barre de l’article (les numéros du producteur pour l’article en question ainsi que le chiffre de contrôle). Le code barre est recherché en temps réel par la machine Franc-Prix à partir du nom de l’article.
- L’ordre des articles, représentés par une bande de couleur, correspond à leur ordre de passage à la caisse.
- Un espace blanc coupe chaque bande : sa taille est calculé en fonction du prix de l’article représenté.
- Enfin la taille du tableau correspond à la somme total des articles (1 cm = 1 euros).
L’artiste est invité à reproduire plusieurs fois le même geste pour chaque facture pendant un certain temps en vue de réaliser une collection particulière qu’il pourra exposer comme Å“uvre unique. Cette collection pourra être mise en relation avec d’autres collections du même type faite ultérieurement afin de suivre si ce n’est l’évolution de la qualité artistique des productions de l’artiste en question, l’évolution de sa qualité de vie.
Action
Chaque œuvre, dans un contexte d’exposition est sa propre publicité. L’exposition rend publique, mais c’est aussi une « exhibition ». Dans le contexte de l’Entertainment, rendre publique un produit est devenu pratique courante. La fusion entre production et promotion est totalement consommée. Allons jusqu’au bout de la logique du système en proposant d’exposer une œuvre qui est la promotion d’une autre dans un musée ou une collection prestigieuse. La pièce support promotionnel doit reprendre les traits stylistiques de l’art contemporain dans sa variante académique.
Projet de carrière d’artiste
Dans la lignée des carrières d’artiste possible, on peut imaginer de consacrer sa vie à la création de papiers-peints à haute valeur symbolique. La surface du monde et son appropriation symbolique prenant le pas sur sa substance, on peut penser, à moindre frais, produire en toute circonstance un revêtement mural signifiant. D’autres projets précédemment mentionnés entre dans cette catégorie.